il y a vraiment des choses qui se passent quand on est ensemble

une coccinelle sur un trottoir
une coccinelle sur un trottoir Ă  Montmartre

J’ai troquĂ© ma sacro-sainte grasse matinĂ©e du samedi contre une promenade dans Paris. Contre un cinq Ă  sept de huit Ă  dix. Exit l’humeur ours des cavernes que j’arbore gĂ©nĂ©ralement le week-end. Le cƓur lĂ©ger, j’arpente Montmartre. Je photographie le photographe qui photographie les immeubles sur lesquels j’ai longtemps lorgnĂ©. Je cherche une terrasse au soleil oĂč continuer la lecture d’un ouvrage que m’a offert une cliente. Avant de me poser au soleil rue Lepic, j’ai trouvĂ© une vieille valise en cuir encore potable dans laquelle je range blouson, pull, Ă©charpe blanche. Je lis distraitement les pages Ă©cornĂ©es Ă©voquant signes et chemins qu’empruntent nos existences. J’Ă©coute mes voisins de tablĂ©e. Main dans la main sur la table en mosaĂŻque, l’homme dit Ă  la femme : il y a vraiment des choses qui se passent quand on est ensemble.

J’Ă©tais amoureux cinq minutes d’un bel Italien vivant Ă  Bologne, Giulio. Cinq minutes. Huit jours. Il achĂšte son billet d’avion afin que nous nous rencontrions. Nous Ă©changeons des mots doux, de longues discussions. Je craque pour son sourire d’ange. Puis il prend ses distances. Je lui Ă©cris une lettre : nous pouvons ĂȘtre amis, amants, amoureux, ce qu’il veut. Nous pouvons aussi bien ne jamais nous rencontrer. Tu dis, tu choisis. Il ne veut pas d’une histoire Ă  distance. Il est trĂšs occupĂ©. DĂ©jĂ  amoureux d’un autre. Etc. Je digĂšre la nouvelle, me fustige, m’en veux de m’Ă©prendre du premier venu. Ça ne devait pas ĂȘtre. C’est tout.

Il était dit que je ne profiterai pas longtemps de cette terrasse ensoleillée. La serveuse encaisse mon café allongé. Et revient dresser la table pour le déjeuner.

— Je ne dĂ©jeune pas, lui dis-je.

Elle sait mais elle doit dresser la table.

— Deux minutes, lui dis-je. Vous avez deux minutes, non ? Je vais pas la salir votre jolie nappe en papier.

—Avec votre livre ? riposte-t-elle, ça m’Ă©tonnerait.

Je baisse les armes, l’envoie promener et descend la rue Lepic, croisant la faune locale, mĂ©lange de gueules cassĂ©es, de vrais-faux nantis, de vieux et de vieilles jouant des coudes, des cannes et du caddie. Et soudain je vois arriver vers moi, le pas dĂ©terminĂ©, le bel Italien dont j’Ă©tais amoureux cinq minutes, huit jours. Giulio. Mes yeux manquent tomber de leurs orbites. Nous avions tirĂ© un trait sur la rencontre. Le hasard a voulu que nous nous rencontrions malgrĂ© tout.  Un court instant quelque part Ă  Paris. Une Ă©treinte et un baiser plus tard, je le laisse Ă  ses amies, lui souhaite un doux sĂ©jour et enfourche un vĂ©lo, stupĂ©fait et souriant aux lampadaires.


fraisier causant avec un pissenlit


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